mardi 18 décembre 2012

Jean-Jacques Dessalines

Jean Jacques Dessalines est né en 1758, dans le Nord d’Haïti. Il grandit sur une habitation dans l’Artibonite. C’est un nègre esclave, charpentier de métier, affranchi au début des années 1790, lorsque la révolution éclate.On le présente comme un esclave rebelle, souvent marron, et au moment de la grande insurrection des esclaves en 1791, il combat dans les premières bandes d’insurgés conduites par Boukman. On le retrouve ensuite dans les bandes de Jeannot, Jean-François, Biassou, avant qu’il n’incorpore l’armée de Toussaint Louverture. Il suit Toussaint au service de l’Espagne, puis de la France, au moment où la République vient d’émanciper les esclaves. Dessalines se fait remarquer par son courage mais aussi sa férocité implacable contre les Mulâtres dans la Guerre du Sud (février 1799-août 1800). Nommé général, il devient le bras droit de Toussaint Louverture et applique avec une extrême sévérité les règlements de culture mis en place sous le régime louverturien afin d’assurer la reprise de la production de sucre et de café après dix ans de guerre civile.Lors de l’expédition française du général Leclerc, en janvier 1802, Dessalines s’illustre par la résistance héroïque de l’armée haïtienne face aux troupes françaises au Fort de la Crête à Pierrot (mars 1802).Après la déportation de Toussaint Louverture, Dessalines apparaît comme l’un des principaux généraux de l’armée haïtienne en guerre contre le corps expéditionnaire français venu rétablir l’esclavage. Mais Dessalines doit aussi se positionner face aux chefs de bandes rebelles, dont de nombreux Africains, qui mènent la guérilla dans les montagnes et opposent une résistance farouche aussi bien à l’armée haïtienne qu’à l’armée française. Au nom de l’unité nationale, Dessalines entreprend de soumettre à son autorité tous les chefs de bandes autonomes ou de les éliminer purement et simplement de l’échiquier militaire et politique. En poursuivant une politique de liquidation plutôt que de ralliement des chefs africains, Dessalines s’impose comme le véritable commandant en chef de l’armée indigène unifiée et le successeur de Toussaint Louverture. L’année 1803 marque l’ascension incontestable de Dessalines. Au Congrès de l’Arcahaie (mai 1803), il crée le drapeau national haïtien en arrachant la couleur blanche du drapeau français. En novembre 1803, il remporte la dernière grande bataille qui marque la capitulation des Français, à Vertières. Le 1er janvier 1804, Dessalines proclame l’Indépendance d’Haïti, aux Gonaïves : Voici sa proclamation: «Citoyens,Ce n’est pas assez d’avoir expulsé de votre pays les barbares qui l’ont ensanglanté depuis deux siècles ; ce n’est pas assez d’avoir mis un frein aux factions toujours renaissantes qui se jouaient tour à tour du fantôme de liberté que la France exposait à vos yeux ; il faut, par un dernier acte d’autorité nationale, assurer à jamais l’empire de la liberté dans le pays qui nous a vus naître ; il faut ravir au gouvernement inhumain, qui tient depuis longtemps nos esprits dans la torpeur la plus humiliante, tout espoir de nous ré asservir ; il faut enfin vivre indépendant ou mourir. Jurons à l’univers entier, à la postérité, à nous-mêmes, de renoncer à jamais à la France, et de mourir plutôt que de vivre sous sa domination. De combattre jusqu’au dernier soupir pour l’indépendance de notre pays !» Devenu Gouverneur général à vie, Dessalines entreprend de consolider l’indépendance d’Haïti. Les généraux du régime, également propriétaires, s’opposent à Dessalines lorsque ce dernier décide de procéder à la vérification générale des titres de propriétés. Complots et conspirations se succèdent, notamment dans le Sud, fief traditionnel des Mulâtres. De fait il est en désaccord avec la base populaire et paysanne,qui le désavoue. Le 17 octobre 1806, Dessalines, qui s’était entre temps proclamé empereur sous le nom de Jacques 1er, est assassiné. La foule s’est acharnée sur le cadavre dont les restes méconnaissables furent rassemblés dans un sac par une vieille folle nommée Défilée qui les transporta de nuit au cimetière de l’intérieur où l’on fit ériger un modeste tombeau portant l’épitaphe : «Ci-gît Dessalines, mort à 48 ans». Jean-Jacques Dessalines, restera le premier chef d’Etat haïtien, fondateur de l’Indépendance. Il restera aussi un personnage controversé dans l’histoire d’Haïti. Il a néanmoins poursuivi la guerre d’Indépendance, après l’arrestation de Toussaint Louverture. En 1892, le Président Hypollite en hommage fit édifier un mausolée portant l’inscription : «Jean-Jacques Dessalines, fondateur de l’Indépendance d’Haïti. Mort en 1806, à l’âge de 48 ans. En témoignage d’admiration et de reconnaissance pour l’acte mémorable du 1er janvier 1804».

vendredi 7 décembre 2012

Retour sur les origines du Cameroun 1ére partie: le rôle de l'Allemagne

Le Cameroun naît entre 1884 et 1914. Les circonstances dans lesquelles les Allemands ont été amenés à mettre la main sur le « Cameroun » demeuraient quelque peu mystérieuses. Plusieurs thèses ont été développées chacune rajoutant des informations importantes et souvent capitales pour connaître les vrais déroulements de ce processus. La région qui allait devenir le Cameroun était alors ethniquement et politiquement très morcelée. On ne comptait pas moins d´une centaine de groupes ethniques différents, parlant chacun son dialecte, adorant chacun ses dieux, possédant chacun son histoire, ses coutumes et ses traditions. Les systèmes politiques allaient du type non étatique (les populations bantu de la forêt « sud-camerounaise » et les populations dites païennes du « Nord-Cameroun »j jusqu´aux formes étatiques du pouvoir (les petits royaumes côtiers, les chefferies Bamiléké, les royaumes Bamoun et Tikar, les principautés Kotoko, les sultanats et lamidats du « Nord-Cameroun », etc.). De même , les structures sociales variaient du type clanique égalitaire jusqu´au type « féodal » fortement hiérarchisé.Le terme même de « Cameroun » n apparaît guère avant le XVIe siècle. Pour rappel, le Cameroun tire son nom d´un mot portugais camarôes), qui signifie « crevette ». Les Portugais atteignirent, en effet, le fond du golfe de Guinée à la fin du XVe siècle, en 1471-72 semble-t-il. Ils furent frappés par un phénomène extraordinaire qui se produit encore de nos jours, tous les quatre ou cinq ans : le pullulement dans une rivière de la côte (le Wouri) de crustacés de couleur blanchâtre. Ils appelèrent le vaste estuaire du Wouri « Rio dos Camaroes », la rivière des crevettes. Sous l´influence espagnole, l´estuaire du Wouri fut désigné sous la forme de « Rio de los Camerones » ou « Rio dos Camerones ». Sous l´influence anglaise, le nom se transforme au XIXe siècle en « Cameroons » (« Cameroons River »). Pendant longtemps, il fut attribué à la contrée sise de part et d´autre des rives du « Fleuve Cameroun » (« le pays des Camarones » ou « la province des Camarones ») et aux habitants de cette même contrée (« les Camarones »). Il fut également donné à l´actuelle ville de Douala (« Cameroons Town », « at Cameroons », « à Cameroun »), et à la montagne voisine (« Cameroons Mountains », « le Mont Cameroun »). Ensuite, les Allemands étendirent la dénomination, de forme germanique, « Kamerun » à l´ensemble du pays, c´est-à-dire à leur colonie, distinguant ainsi le pays de « la ville de Cameroun » qui reçut, à partir de cette date, le nom de « Douala », le nom des populations qui habitent cette région. Les Français en ont fait « Cameroun ». C´est en 1884 que Bismarck se résolut à engager une politique d´expansion coloniale. Mais déjà au début du mois d´avril 1883, à l´occasion d´une convention signée le 28 juin 1882 et publiée en mars 1883 par laquelle l´Angleterre et la France garantissaient réciproquement des droits égaux à leurs commerçants dans leurs possessions africaines, le Chancelier avait demandé à son ministre des Affaires étrangères, le comte Hatzfeld, de faire remettre aux magistrats des villes hanséatiques une note les invitant à proposer des mesures pour favoriser l´extension du commerce allemand sur la côte occidentale d´Afrique. Le 9 juillet, le sénat de Brême en Allemagne recommande deux mesures essentielles: la conclusion de traités de commerce avec les chefs indigènes; la formation d´une escadre chargée de visiter régulièrement les comptoirs allemands pour faire impression sur les indigènes et pour les intimider. Il n´était absolument pas question d´annexions territoriales. Quant à la Chambre de commerce de Hambourg, présidée par le célèbre négociant Adolf Woer-mann, qui avait des intérêts sur la côte occidentale d´Afrique, elle adressa à Bismarck, le 6 juillet, un long et intéressant mémoire. Le fait décisif qui a motivé « le revirement de 1884 » fut incontestablement le mémoire que le conseiller intime de légation aux Affaires étrangères, Henri de Kusserow, adressa à Bismarck le 8 avril 1884. Le fonctionnaire allemand y développait l´idée que, par le biais des compagnies à charte, très en vogue dans les possessions anglaises, l´Allemagne pouvait acquérir des colonies sans que l´État se charge ni de leur administration ni de leur mise en valeur. Cette idée plut tellement à Bismarck que le Chancelier décida de la mettre aussitôt en pratique. Le mémoire de la Chambre de commerce de Hambourg plut tellement à Bismarck que le Chancelier en accepta intégralement le programme. Le 22 décembre, le comte Hatzfeld fit connaître à la Chambre de commerce, par M. de Wentzel, les mesures que le Gouvernement comptait prendre pour répondre à ses vœux. Il annonçait en particulier qu´un commissaire impérial allait être désigné pour se rendre en Afrique et engager des négociations avec des souverains indigènes dans différentes parties de la côte occidentale. Ainsi s´explique la présence du Docteur Nachtigal sur la côte du « Cameroun » en juillet 1884. Les Allemands y commerçaient depuis longtemps. Dès 1868, la Maison Woermann, de Hambourg, avait installé un comptoir à Cameroun. En 1875, la Maison Jantzen et Thormâhlen, également de Hambourg, participait à Cameroun, elle aussi, à la traite de l´ivoire et de l´huile de palme. A partir de cette époque, le commerce allemand sur la côte occidentale d´Afrique connut un développement et une extension. Dès 1883, la moitié du commerce de l´Afrique occidentale était entre les mains des Allemands. Pour concurrencer les Anglais, la Maison Woermann relia Hambourg et l´Afrique occidentale par une ligne allemande de navigation à départs réguliers. Déjà en 1874, elle avait demandé au ministère des Affaires étrangères de nommer un consul allemand à Cameroun. Aucune suite officielle ne fut donnée à cette requête.

dimanche 2 décembre 2012

L'impact de la guerre 39/45 au Cameroun

la fameuse guerre de 1939/1945 a joué un rôle important dans l’évolution du pays, et dans l'esprit des Camerounais. Et pourtant, tout part du second conflit mondial. Le Cameroun moderne a pris naissance dès l’entrée en guerre de la France contre l’Allemagne, et plus précisément, dès la défaite française en juin 1940. En effet, la France terrassée, s’est retrouvée divisée en deux, territorialement, mais aussi, politiquement. Il y a ainsi eu une France légale, celle de Pétain qui collaborait avec l’Allemagne, et une France illégale, celle de la rébellion, dirigée par le Général Charles de Gaulle, qui avait refusé de collaborer avec l’ennemi, et d'ailleurs, il avait décidé de poursuivre la guerre après la capitulation du mois de juin 1940. Ne disposant, ni de troupes, ni de soutiens politiques, la France de la rébellion, qui s’était attribuée l’appellation de « France libre », s’est tournée vers l’Afrique centrale, qui était dénommée, à l’époque, Afrique Equatoriale Française, AEF, pour se doter de ses premières troupes, et d’une capitale politique, à savoir, Brazzaville au Congo. Dès le mois d’août 1940, le gouvernement légal de la France avait sa capitale basée à Vichy, une ville située dans le centre de la France, tandis que la France rebelle, quant à elle, avait la sienne basée à Brazzaville, au Moyen-Congo, ainsi était désigné l’actuel Congo-Brazzaville. Le Tchad, à travers le gouverneur Félix Eboué, et le Cameroun, à travers le débarquement du colonel Leclerc dans la nuit du 27 août, ont été les premiers territoires de la « France libre ». Ces deux pays ont, également, fourni les toutes premières troupes militaires de la France rebelle. Les deux France ont ainsi coexisté pendant plusieurs années, pratiquement jusqu’au 8 août 1944, date de la libération de la ville de Paris, par les troupes du colonel Leclerc devenu, entre temps général. Mais, pendant que la France connaissait, à la fois l’humiliation de la défaite et celle de l’invasion allemande, elle avait considérablement perdu son prestige dans le monde, et, bien pire pour elle, elle était menacée de perte totale de ses colonies. En effet, d’une part, les « indigènes » recrutés de force pour combattre aux côtés de la France rebelle étaient l’objet dune révolution mentale spectaculaire, caractérisée par la fin de la peur de l’homme blanc qui avait cessé d’être, à leurs yeux, un demi-Dieu. De fait il n’allait plus être possible, pour l’administration coloniale, de continuer à leur faire courber docilement l’échine. Par ailleurs, les Etats Unis d’Amérique et la Grande-Bretagne, à travers la Charte Atlantique signée le 14 août 1941, avaient énoncé plusieurs principes devant régir le monde une fois la guerre achevée, et dont le plus révolutionnaire subversif pour les Français, était celui du « droit des peuples à disposer d’eux-mêmes ». La fin de la guerre laissait présager de terribles conflits à l’intérieur de ce qui était alors l’empire colonial français d’Afrique noire. Que restait-il alors à la classe politique française à faire d’autre, sinon qu’à assouplir la domination qu’exerçait la France sur les « indigènes » d’Afrique noire ? Par exemple, pourquoi ne pas envisager une révolution profonde des rapports avec les peuples qui les composent, et pourquoi pas une participation quelconque de ceux-ci à la vie politique chez eux, sorte de soupape à une quasi-inéluctable insurrection ? Les exemples du continent américain, au 18ème et 19ème siècle n’étaient-ils pas assez révélateurs du désir irrépressible des peuples colonisés à se libérer de leurs colonisateurs ? La guerre de 1939-1945, pour tout dire, a été à l’origine des changements profonds, sur le plan mental et politique, qui se sont produits en Afrique noire et au Cameroun, au milieu du siècle dernier, et qui ont abouti à la proclamation de l'indépendance du Cameroun le 1er janvier 1960.