jeudi 18 novembre 2010

Histoire de la maladie du sommeil 1921/ 1931

2éme partie: AU DÉBUT DE L'OCCUPATION FRANÇAISE

La maladie fut signalée par les médecins de Yaoundé et de Doumé dès 1916.
En 1917-1918, le Docteur Jullemier visita les rives du Nyong et de la Sanaga, de même qu'une partie de la région comprise entre ces deux fleuves. Il constata que tous les villages situés sur la rive droite du Nyong, entre l'Ayong et Akonolinga, étaient contaminés. Une exploration rapide en 1919 confirma ces faits, et révéla que la maladie, épidémique à Akonolinga, se propageait nettement vers Yaoundé, jusqu'à 20 Km. environ de la ville.
Le Docteur Jojot fut chargé d'organiser le secteur du HautNyong au début de 1920. Ce secteur groupait alors les 3 subdivisions d'Akonolinga, d'Abong-Mbang et de Doumé.
Jojot établit le centre de ses activités Ayos. En collaboration avec le Docteur Huot, il visita, en l'espace de 26 mois, la plupart des villages du secteur, examina 70.000 habitants, parmi lesquels il dépista 8.548 trypanosomés
En mars 1922, le Docteur Jamot fut appelé à poursuivre la lutte commencée par le Docteur Jojot.
Jamot et ses collaborateurs entreprirent la prospection des 3 subdivisions formant le secteur du Haut-Nyong.
Voici quelle était la situation de ce secteur à cette époque-là, telle que le Docteur Jamot la présente lui-même:

"Le cours du Nyong est l'axe d'un foyer épidémique extrêmement violent. Dans les agglomérations situées au voisinage du fleuve, entre Abong-Mbang et Kolmaka, la maladie existe presque partout à l'état épidémique et dans 46 villages dont la population totale est de 20.351 habitants, nous avons recensé 14.374 trypanosomés sur 17.797 personnes visitées. Dans 59 groupements de cette région, les taux d'infection atteignent ou dépassent 40 %; dans 36, ils sont supérieurs à 60 % et dans 11 ils varient de 80 à 97 %."

Enfin, dans l'ensemble des régions visitées, les médecins avaient pu constater que la trypanosomiase tuait, à elle seule, à peu près autant d'individus que toutes les autres maladies réunies, et que la mortalité générale était deux fois plus élevée que la natalité.
Mais le Docteur Jamot ne tarda pas à se rendre compte que la maladie avait nettement débordé le secteur pour envahir les groupements voisins. Les taux d'infection y étaient variables, mais généralement fort élevés.
De plus, le foyer se révélait intense au Nord, au Nord-Ouest et à l'Est de Doumé. Sa progression se faisait activement sur les rives du Nyong, dans la direction de Yaoundé.
La seule limite compatible avec une véritable prophylaxie est celle du 0 absolu: Jamot venait de toucher du doigt cette vérité capitale.
C'est ainsi qu'en 1923, au cours d'une de ses prospections, il pénétra dans la subdivision de Yaoundé où il dépista plusieurs cas de trypanosomiase jusqu'aux portes mêmes de la ville.
Or, a cette époque-là, les autorités administratives du Cameroun ne voulaient pas entendre parler de la maladie du sommeil ailleurs que dans le Haut-Nyong. Indépendamment du scepticisme qui ne régnait encore que trop chez bien des profanes, la construction du chemin de fer Eseka-Yaoundé nécessitait une main d'œuvre importante. Il ne pouvait être question de compromettre de quelque façon le recrutement, fût-ce au nom d'un péril menaçant des populations entières!
Aussi, d'avoir révélé que le mal était plus répandu qu'on ne pensait dans le pays, le Docteur Jamot venait de commettre une sorte de crime d'Etat.
Le chef de circonscription de Yaoundé le chassa de son territoire. Le Haut-lieu lui donna l'ordre formel de rejoindre Ayos et de cesser tout travail.
Enfin, un Inspecteur des affaires administratives fut envoyé pour enquêter sur les activités du Docteur Jamot...
Dégoûté et quelque peu découragé par la façon dont ses efforts étaient compris et jugés, Jamot décida alors d'aller prospecter le Nord-Cameroun .

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