mardi 14 décembre 2010
le mémorial de l'esclavage à BIMBIA
"De plus en plus, des gens venant de partout nous demandent de les conduire ici", indique Johnson Janvier Mondoa, guide de la communauté forestière de Bimbia Bonadikombo. "Ce sont ces choses-ci qui les attirent", ajoute l'un des pensionnaires du Camp Saker, en montrant du doigt les vieux ustensiles dont se servaient les marchands d'esclaves.
Nous sommes au village camerounais de Bimbia au bord de l'Atlantique dans la province anglophone du Sud-Ouest qui conserve des vestiges de la traite négrière.
Les clochettes et les bracelets sont encore solides tandis que le cadenas n'est plus qu'une coque vide toute rouillée. Bien qu'en mauvais état et ébréchés, les pots ont résisté au temps. Mais la plus grande curiosité ce sont les lourdes chaînes de quelque deux mètres de long. Le visiteur peut aisément imaginer les atroces souffrances qu'enduraient les personnes enchaînées. Le guide nous montre ensuite le chemin emprunté par les esclaves ainsi entravés. Il mène à la plage où stationnent aujourd'hui 4 pirogues de pêche fouettées de temps en temps par de petites vagues. Sur un rocher noir, pointe un canon allemand. Vestige, lui, d'une autre époque, celle de colonisation allemande, avant la Première Guerre mondiale.
À 200 m dans l'océan, on aperçoit Nicholls Island, une île envahie par la forêt. "C'est là qu'on parquait les esclaves transportés en pirogue, indique Teta Likanjo, un habitant de la localité. C'était une sorte d'antichambre avant le grand voyage vers l'inconnu. Les esclaves y restaient jusqu'à ce que le bateau qui devait les transporter arrive. Si on y fouille bien, on retrouvera sûrement d'autres objets que les esclaves et leurs maîtres utilisaient." Les esclaves embarqués sur l'île Nicholls étaient ensuite acheminés vers les Amériques. Mais, précise Prince Oscar Etute, actuel chef de la localité, si le bateau n'était pas plein, il faisait escale à Fernando Po (l'actuelle île de Bioko en Guinée-Équatoriale, Ndlr) ou sur les côtes du Sénégal pour collecter d'autres esclaves. Seize ans après la découverte de cette nouvelle "route de l'esclave", Bimbia demeure très peu connue. Seuls quelques guides indépendants et agences font la promotion de ce site qui est au Cameroun ce que l'île de Gorée est au Sénégal. L'Unesco et l'Organisation mondiale du tourisme ont lancé en 1995 à Accra, au Ghana, le programme "Tourisme culturel sur la route de l'esclave" en vue de faire l'inventaire des sites et lieux de mémoire liés à la traite et d'étudier leur réhabilitation et leur valorisation touristique. Au total, 118 sites ont été inventoriés dans 11 pays africains, dont 10 francophones. Le projet s'attache également à la formation des acteurs du tourisme culturel. La mise en œuvre complète de ce projet fera-t-elle de Bimbia un nouveau haut lieu de pèlerinage en Afrique ?
Inscription à :
Publier les commentaires (Atom)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire